La régionalisation avancée au Maroc : état des lieux
Jouir d’un environnement sain est
un droit fondamental, et l’article 31 de la Constitution marocaine du 1er
juillet 2011 le stipule. Pour faciliter l’égal accès des citoyennes et citoyens
aux conditions leur permettant de jouir de ce droit, les régions, aussi bien
que l’État et les établissements publics, œuvrent à la mobilisation de tous les
moyens possibles. La régionalisation avancée au Maroc s'inscrit
pleinement dans le cadre d'un État démocratique décentralisé et marque un bond
qualitatif dans le processus de démocratisation de la société.
En effet, le choix de la régionalisation
avancée au Maroc n’est pas qu’un simple aménagement et un découpage
territorial. Elle reflète la détermination du Royaume à profiter de l’élan de
la modernisation des États au niveau mondial, ainsi que la volonté d’amplifier
son développement durable à travers la mobilisation des synergies locales. Depuis
son accession à l’indépendance, le Maroc a mis en place différentes approches
et stratégies pour faire face aux enjeux du développement. À travers une
régionalisation avancée inclusive et cohérente, le pays aspire à un
développement économique harmonieux dans toutes les régions du Royaume. Alors,
qu’en est-il de la régionalisation avancée au Maroc aujourd’hui ?
Processus de la régionalisation avancée au Maroc
La régionalisation se définit
comme une forme de décentralisation au profit des régions auxquelles un état
accorde une autonomie administrative et transfère certaines de ses
prérogatives. La décentralisation, elle, est la politique de transfert du
pouvoir de l'État aux collectivités locales ou aux institutions publiques afin
qu'elles aient un pouvoir juridique et une autonomie financière. Le transfert
de ces responsabilités est toujours sous la tutelle de l'État.
La régionalisation a pour
objectif de renforcer le processus démocratique à travers l'instauration d'une
démocratie locale et l'assurance de la gestion de proximité en incluant les
acteurs locaux dans la gestion autonome de leurs affaires adaptées à leurs
spécificités et aux potentialités de leurs régions afin de réaliser un
développement endogène.
Après l’indépendance, la
régionalisation au Maroc a refait surface vers l’année 1971 avec le premier
découpage en 7 régions purement économiques.Â
Et depuis, elle a connu de multiples changements. Le dernier changement date
de 2010 où le Roi lance les piliers de la nouvelle notion de la régionalisation
avancée au Maroc. Cette dernière revête dès lors un aspect plus
décentralisé et non seulement déconcentré qui se veut comme la confirmation de
la volonté du Maroc à suivre le train de la mondialisation, et d’enraciner les
pratiques de bonne gouvernance. Pour faire aboutir ce chantier de réforme, la Commission
Consultative de la Régionalisation (CCR) a proposé un découpage régional
fonctionnel capable de contribuer au renforcement de la démocratisation de l'État
et d'amorcer une nouvelle conception de la relation qui lie la région à l'État
et aux collectivités territoriales. Ce découpage régional a fixé alors le
nombre des régions à 12.
La Constitution marocaine
considère la région comme la référence qui sous-tend l’organisation
territoriale du Royaume. Le dernier alinéa du premier article de la
Constitution dispose en effet que : « L’organisation
territoriale du Royaume est décentralisée, fondée sur une régionalisation
avancée ».Â
La régionalisation avancée du Maroc veut alors prôner une
décentralisation au profit d’assemblées régionales élues.  Ces dernières disposent des compétences
essentielles dans différents domaines, qu’il s’agisse du développement
économique ou du développement rural, mais aussi des domaines de l’énergie, de
l’eau et de l’environnement, du transport, du tourisme, de la culture, ainsi
que du domaine de l’emploi, de la formation professionnelle et de la formation
continue.
La régionalisation avancée au Maroc : certaines lacunes subsistent
À travers la réforme de la régionalisation avancée au Maroc, le
Royaume veut décliner l’action publique et les ressources humaines et
financières nécessaires pour un développement territorial inclusif et durable.
Dans sa globalité, le processus de régionalisation et de développement
territorial avance petit à petit. Même que sur le terrain, une évolution
qualitative est constatée à la faveur de conceptions et approches
multidimensionnelles. Des efforts soutenus ont été consentis à l’effet de
poursuivre la matérialisation des actions, compte tenu de la place
constitutionnelle de la régionalisation avancée et de son importance dans
l’édifice institutionnel du pays.
Néanmoins, après plus de 6 ans
après le lancement de la nouvelle expérience de la régionalisation avancée au Maroc, les responsables
gouvernementaux et les élus reconnaissent que le pays est encore assez loin des
objectifs tracés. Entre autres, si l’arsenal juridique relatif à la
régionalisation avancée est aujourd’hui pratiquement achevé, le chantier accuse
un certain retard. Notamment, le cadre
juridique, en particulier la loi, doit être adapté pour une meilleure
efficacité de la régionalisation et leur participation entre autres, aux
efforts de relance post-épidémie.
Par ailleurs, certaines
défaillances ont été constatées, entravant le bon fonctionnement du processus.
Par exemple, on ne peut que constater une application partielle du principe de
subsidiarité qui conduit à un aboutissement partiel de la déconcentration
administrative. Une répartition géographique incohérente des moyens de l’ État
et des structures déconcentrées sans autonomie décisionnelle peut être à la
source de ce retard dans la mise en œuvre de la déconcentration administrative.
Le transfert des compétences vers
les conseils des régions est aussi une étape importante dans la mise en œuvre
de la régionalisation avancée au Maroc.
Pourtant, il existe des lacunes en ce qui concerne la collaboration avec
l’ensemble des départements ministériels, mais aussi certaines entreprises
publiques pour assurer justement ce transfert.
Certains élus et responsables
gouvernementaux rapportent une insuffisance de réflexion autour des modalités
de mobilisation des financements nécessaires aux programmes de développement
régional et à leur diversification grâce à différents partenariats. Combiné Ã
une carence du principe d’autonomie financière des régions, cela peut être à la
source d’une insuffisance de financement. Selon les derniers chiffres du ministère
de l’Intérieur en novembre 2021, il a été procédé à la signature de 5 contrats-programmes
entre l’État et les régions pour la mise en œuvre des projets prioritaires des
programmes de développement régional. Ils concernent les régions de Fès-Meknès
(11192,90 millions DH), Dakhla-Oued Ed-Dahab (574 millions DH), Béni
Mellal-Khénifra (6245,21 millions DH), Guelmim-Oued Noun (5554,40 millions DH)
et Souss-Massa (2478,67 millions DH).
Somme toute, sur le moyen ou long terme, le défi est alors de pouvoir dépasser les dysfonctionnements qui freinent encore la mise en place effective de la régionalisation avancée au Maroc afin d’atteindre les objectifs escomptés de ce chantier stratégique qui vise à instaurer un modèle de développement socio-économique territorial inclusif et durable.