Le secteur informel au Maroc : quel impact sur l'économie ?
Depuis les années 70, le secteur informel au Maroc occupe le
champ de l’économie du pays. L'émergence d'une véritable économie moderne au
Maroc se trouve hypothéquée par l'économie parallèle du secteur informel.
Aujourd’hui, ce dernier pèse encore dans le marché du travail et au niveau de
certaines activités productives au pays. Selon le résultat d’une étude publiée
par Bank Al-Maghrib en 2021, le secteur
informel au Maroc représente environ 30% du PIB.
Économie informelle, économie
clandestine, économie souterraine, économie noire… plusieurs termes qualifient
l’économie parallèle émanant du secteur informel. Si le secteur informel reste
souvent une composante structurelle et durable des économies en développement,
quels peuvent être les avantages et
inconvénients du secteur informel au Maroc ? Quels sont ses impacts
sur l’économie du pays ?
Le secteur informel au Maroc : quels avantages ?
Au Maroc ou ailleurs, l’économie
informelle est une réalité massive à l'échelle mondiale. Notion polysémique et
extensible, le secteur informel est assimilé soit à un secteur en voie
d’absorption soit au sous-emploi et au chômage, à des activités marginales ou
encore à des activités de petite production dominées et soumises au secteur
formel « capitaliste ». Dans le sens commun, il est synonyme de
pauvreté, d’activité de rue, d’absence de cadre réglementaire, de lacune dans
l’enseignement (information)... Cependant, de nombreux organismes
internationaux et pouvoirs publics sont de plus en plus convaincus de certains
avantages que peut apporter le secteur informel face à la crise de l’emploi et
aux déséquilibres budgétaires des pays.
Le niveau élevé de l’informalité
de la production et d’emploi pose des défis majeurs de politique économique. De
nombreuses entreprises et travailleurs n'ont pas la capacité d'opérer dans un
cadre formel, en conformité avec les dispositifs juridiques, fiscaux et du
marché du travail en vigueur. Le secteur
informel au Maroc serait donc avant tout leur seule option possible pour
participer à la vie économique, plutôt que de rester inactifs sans travail ou
complètement exclus de tout type d'activité économique.
Par ailleurs, la contribution du secteur informel au Maroc à l’emploi et
au revenu des ménages reste forte aussi bien dans le milieu rural que dans le
milieu urbain. Il semble même que les petites activités et travail « au
noir » sont devenus une composante durable et structurelle de l’économie
urbaine. En outre, elles offrent une échappatoire d’importance aux effets de
l’exode rural en absorbant une bonne partie de la main d’ouvre à la recherche
d’un emploi. Le secteur informel est alors un pare-chocs ou amortisseur social
dans la mesure où il est un pourvoyeur d’emploi et de revenu permettant à une
population urbaine notamment défavorisée de survivre.
Les activités informelles
constituent en sorte une réponse de la société à des besoins nouveaux. Elles
sont aussi des inventions sociales dans un contexte précaire qui amènent les acteurs
à diversifier leurs stratégies d’insertion par la pluriactivité, à minimiser
les risques par la recherche d’opportunités de revenu et à s’adapter à des
catégories sociales à faible pouvoir d’achat. Et en dispensant une formation
sur le tas dans des relations paternalistes complexes, le secteur informel
constituerait même une réserve de qualification pour le secteur formel « moderne ».
Les inconvénients liés au secteur informel au Maroc
Nombreux sont ceux qui ne cessent
de souligner la forte nuisance des entités opérantes dans le noir, puisqu’elles
ne payent ni impôts pour l’État ni couverture sociale pour leurs employés, et
pratiquent ainsi, une concurrence déloyale aux entreprises structurées. Bien
souvent, les revenus du secteur informel
au Maroc ne permettent pas aux travailleurs de faire les déclarations
nécessaires, de tenir une comptabilité, et d’adopter le reste des démarches
nécessaires à l’exercice d’une activité économique organisée par la loi. Pourtant,
il existe des activités informelles qui génèrent d’importants revenus (chiffre
d’affaires) avec des travailleurs exercent délibérément.
L’économie informelle crée alors
un manque à gagner certain en termes de recettes fiscales et sur le volet des
cotisations sociales à l’État, mais aussi un manque de création de valeur pour
l’économie marocaine. Les entreprises formelles marocaines concurrencées par
celles du secteur informel perdent en rentabilité (chiffre d’affaires) en
limitant les investissements, l’innovation, la capacité des acteurs et
l’amélioration de la productivité.
Les inconvénients de
l’informalité se ressentent également dans la chute des prix et de la qualité
des produits et services (contrefaçon, non-respect des normes…). Et bien
entendu, l’informel impacte directement sur la qualité de l’emploi qui se
caractérise par la précarité, l’instabilité, l’absence d’avantages sociaux et
un salaire moyen faible.
Le secteur informel au Maroc constitue l’un des
grands défis du gouvernement
Certes, l’amélioration des
conditions de vie des populations passe inévitablement par leur intégration
dans l’économie formelle. Mais il s’agit surtout d’identifier, d’examiner des
mesures incitatives, existantes ou à venir, susceptibles d’encourager le
passage vers le formel, au moins de compenser le manque à gagner qui pourrait
résulter de cette transition pour les populations concernées.
Le secteur informel continue de
constituer une grande partie de l’économie nationale malgré les ambitieux
programmes gouvernementaux de mise à niveau de l’économie (plan Émergence, Plan
Rawaj, Imtiaz, Moussanada…) qui visent à rapprocher le monde de l’informel de
celui du formel. Ces dernières années, le gouvernement œuvre à traiter de façon
définitive les problématiques économiques liées au secteur informel au Maroc. Entre autres, une attention particulière
a été portée récemment sur le statut auto-entrepreneur, utilisé comme
instrument permettant des domaines d’activité plus larges. Il est évident qu’un
cadre institutionnel réglementaire complexe et contraignant favorise le
développement des activités informelles. Les procédures d’obtention du statut
seront alors davantage simplifiées, tandis que le plafond des avantages
financiers accordés seront augmentés. En parallèle, les personnes qui ne sont
pas en mesure de déclarer leurs transactions bénéficieront d’un appui.Â