Ahmed Lahlimi, haut-commissaire au
plan, avertit que le taux de croissance annoncé en janvier, à 3,5%, sera plutôt
proche de 2%: «La croissance du PIB sera plus proche de 2%. C’est le niveau le
moins bon des vingt dernières années». Il recommande au passage de profiter de
cette crise pour lancer des réformes structurelles loin des calculs
électoralistes. «Nous devons avoir notre propre façon de gérer les affaires.
Les politiques du FMI datent de 50 ans», poursuit Lahlimi.
Le Centre marocain de conjoncture
est également pessimiste: «La croissance ne devrait pas dépasser 1,5%», déclare
le Pr. Ahmed Laaboudi, directeur général. Le CMC avait prévu un taux de 4,5%
pour 2020!
Bank Al-Maghrib doit, en principe,
livrer ses prévisions mardi 17 mars à l’occasion de la réunion de son conseil.
Contactée par L’Economiste, la représentation de la Banque mondiale au Maroc
affirme que «l’équipe d’économistes est en train de finaliser une note sur ce
sujet».
Ces prévisions pessimistes tiennent
à l’impact des conditions climatiques défavorables et à la conjoncture
internationale avec le coronavirus. Le Maroc enregistre pour la deuxième année
consécutive un déficit de pluviométrie. L’année dernière déjà la production
céréalière n’avait pas dépassé 52 millions de quintaux, en recul de 50% par
rapport à 2018 et de 34% par rapport à la moyenne réalisée entre 2008 et 2017. Pour
la campagne en cours, la situation ne
risque pas d’évoluer favorablement. Mais il faut attendre les statistiques du
ministère de l’Agriculture pour avoir une idée précise.
Pour sa part l’effet coronavirus
risque de peser lourdement sur l’activité même si la facture énergétique va
s’alléger en raison de la baisse des
cours du pétrole. Le risque vient surtout de la demande adressée au Maroc.
Celle-ci pourrait reculer à cause du retrait de la demande chez les partenaires
européens du Maroc.
En France, Bruno Le Maire, le
ministre de l’Economie, a prévenu que l’impact du coronavirus sur la croissance
sera sévère. Les économistes de la Banque de France ne s’attendent qu’à une
progression de 0,1% du PIB sur les trois premiers mois de l’année. Christine Lagarde, présidente de la BCE, a
averti qu’en «l’absence de réaction européenne, il y a un risque que le choc
économique lié au coronavirus soit aussi fort que lors de la crise de 2008».
Au Maroc, le tourisme, le transport
aérien ainsi que l’événementiel sont les premiers secteurs affectés. Le
gouvernement a décidé d’interdire jusqu’à fin mars tous les événements
rassemblant plus de 1.000 personnes. Toutes les conférences, les rencontres
culturelles ou sportives sont annulées.
D’autres secteurs ne sont pas non
plus à l’abri: l’automobile, l’agro-alimentaire, etc. Marc Nassif, DG de la
filiale marocaine du constructeur français, a déclaré à L’Economiste: «C’est
certain que si le marché européen était amené à baisser fortement, nous serions
impactés et je ne peux pas vous garantir que nous ne serions pas amenés Ã
prendre des mesures drastiques. Chose que je ne souhaite pas» (Voir aussi notre
édition n°5716 du mercredi 11 mars 2020).
Ceci étant, le patronat et le
gouvernement comptent bientôt réunir le comité de veille stratégique, une
instance qui a refait surface vendredi 6 mars à l’occasion d’une rencontre
entre les deux parties. En attendant, la
CGEM veut ficeler ses dossiers et organise une réunion avec les fédérations et
les antennes régionales ce jeudi 12 mars.