Dans le cadre de la série « Maroc
Perspectives », le Centre Marocain de Conjoncture (CMC) vient de publier son
rapport annuel n° 51 intitulé « 2020 – 2021 : Ruptures », qui présente le bilan
économique et social relatif à l’année 2019 tout en faisant état des prévisions
et cadrage des années 2020 et 2021.
Dans cet ouvrage, le CMC s’arrête
dans un premier temps sur le double bouleversement de l’économie induite par la
crise sanitaire : le double choc de demande et d’offre est à l’œuvre.
En conséquence, le monde devrait
connaître, en 2020, une récession historique dont l’ampleur s’élèverait à 3 %
du PIB mondial selon les prévisions d’avril du FMI. Tous les indicateurs sont
au rouge : le commerce mondial accuserait un recul compris entre 13% et 32%,
les cours des produits de base chutent et les investissements directs étrangers
pourraient baisser de 40%.
Les risques sont plutôt baissiers et
l’incertitude est grande. Il est « très probable » selon une déclaration en mai
de la directrice générale du FMI que ses prévisions de croissance soient encore
revues à baisse ; la pandémie de coronavirus frappant les économies plus
durement que prévu.
Comptes Extérieurs : Les flux des
échanges sous l’onde de choc de la pandémie
Subissant les effets d’une
conjoncture internationale poussive, les flux commerciaux ont connu une nette
décélération au terme de l’exercice écoulé. Les exportations de marchandises
ont enregistré une progression d’à peine 2,4 % en 2019 contre 10,7 % l’année
précédente. La même tendance est relevée au niveau des importations dont la
valeur globale a augmenté durant le même exercice de 2 %. La baisse de régime
des flux commerciaux s’est cependant accompagnée d’une stabilisation du déficit
commercial et même d’une légère amélioration de l’équilibre des transactions
courante à la faveur de l’excédent des échanges de services et des flux
financiers de la migration. Le déclenchement de l’épidémie du coronavirus à la
fin du premier trimestre et la série de mesures drastiques prises pour en
atténuer les effets sur la santé de la population ont complètement déstabilisé
les flux des échanges. Les données portant sur la période couvrant les quatre
premiers mois de l’année en cours font état d’une contraction sans précédent
des transactions sur les marchandises et les services ainsi que des flux
d’investissement.
Politique Économique : Quels
ajustements face à la pandémie ?
Alors que l’action de politique
économique était prioritairement orientée depuis le début de l’année vers la
consolidation des acquis au plan de la croissance, de l’emploi et des
équilibres financiers, le déclenchement de la crise sanitaire a complètement
perturbé la dynamique du système économique et ses ressorts internes, remettant
en cause à la fois les programmes préétablis et les objectifs correspondants.
La réactivité des autorités face à la menace de pandémie à travers les
décisions rapides de fermeture des frontières et de confinement des populations
a eu pour conséquence un arrêt presque immédiat de l’activité dans les secteurs
les plus exposés comme l’hôtellerie, les transports, la restauration, le
commerce, la construction ou les industries manufacturières. Outre ses effets
sur les revenus, l’emploi et l’équilibre social, la chute de l’activité a eu
par ailleurs des répercussions importantes sur les équilibres financiers. Aussi
bien la baisse des recettes fiscales constatée au cours des premiers mois de
l’année que la forte contraction des exportations et des flux financiers en
provenance de l’extérieur durant la même période annoncent, en effet, de fortes
tensions sur les équilibres financiers, interne et externe, pour le restant de
l’année. Cette situation inédite incite à la réflexion sur les nouveaux
ajustements nécessaires à la politique économique pour plus d’efficacité et de cohérence.
Dynamique du Marché du Travail : Que
nous cache la parenthèse Covid-19 ?
La pandémie du Covid–19 est, on n’en
peut plus douter, une profonde crise qui se caractérise par sa rapide
propagation à l’ensemble du globe, traînant dans son sillage une mortalité qui
paralyse l’ensemble des économies avec des conséquences des plus fâcheuses sur
les marchés du travail. Ce dernier subit de plein fouet les nuisances d’un
impact qui porte, à la fois, sur l’offre, en raison d’une paralysie quasi
totale du processus de production des biens et services et sur la demande qui
se rétracte sous l’effet de la baisse de la consommation et de la contraction
de l’investissement… Plusieurs milliers de postes d’emploi sont mis en suspens
quand ils ne sont pas définitivement détruits provoquant une recrudescence
inégalée de chômage. Des secteurs entiers sont sinistrés et font face à un
avenir incertain. C’est le cas, notamment, du tourisme et des transports qui
sont gravement touchés dans leur segment aérien. Une situation délétère
menaçant de faillites les entreprises dans leurs différentes tailles, de perte
d’emplois sans distinction entre secteurs structurés ou informels et partant de
détériorations manifestes de revenus pour une vaste partie de la population.
Chute des Cours du Pétrole : Une
aubaine asphyxiée par le Covid-19 mais pas que…
Sous l’emprise du Coronavirus, les
cours du pétrole se sont effondrés dans un effet combiné d’une demande
velléitaire et d’une offre surabondante. Les prix ont atteint leur plus bas niveau
historique, pendant que les projections manquent d’audace et d’ingéniosité pour
prédire l’avenir d’un contexte géopolitique réputé alambiqué. La crise
sanitaire déclenchée en Chine et que l’on croyait, au départ, circonscrite dans
ce pays, a frappé violemment le marché pétrolier mondial. En réalité, ces
perturbations ne peuvent être imputées, dans leur totalité, à la rapide
propagation d’un virus méconnu et porteur d’une inébranlable nuisance. L’amorce
de cette dépression énergétique est due, pour une grande part, à la
reconversion des États-Unis, qui depuis 2018 se sont hissés au rang de premier
producteur mondial du pétrole brut, en débordant l’Arabie Saoudite et la
Russie. Dans cette posture, les USA, qui font face à une période préélectorale
brouillée par la crise sanitaire, sont tiraillés entre l’adoption de prix bas
des carburants pour gagner l’adhésion des électeurs et un prix suffisamment
élevé du pétrole pour préserver la rentabilité de l’exploitation des schistes.
Dans cette mouvance, pilotée par les Américains, la stratégie énergétique du
Maroc, largement tributaire des importations de charbon, de pétrole et de gaz,
s’emploie à poser les jalons pour une promotion des sources domestiques de
production d’énergie.
Secteurs Productifs : Des évolutions
timides
Les deux secteurs clés de l’économie
nationale n’ont pas bien fonctionné en 2019. Après l’excellente campagne
agricole 2017-2018 intervient l’une des plus mauvaises campagnes de l’histoire
du Maroc. En cause les conditions climatiques très rudes qui ont prévalu au
cours de cette période. L’espoir d’une bonne récolte céréalière que laissaient
entrevoir les premières pluies du début de la campagne s’est très vite dissipé.
De ce fait, la production des quatre principales céréales a chuté de plus de
42% et, n’eût été un rattrapage au niveau des autres cultures, l’année aurait
été catastrophique.
Pour sa part l’activité industrielle
peine à accélérer davantage son rythme de croissance. Il est resté autour de
2%. Cette cadence a pu être maintenue grâce au bon comportement de l’industrie
automobile et des industries de la métallurgie qui ont évolué à des taux
dépassant 6% d’une année sur l’autre.
Un dispositif de Garanties pour
Soutenir les Entreprises : Le système financier à l’épreuve de la pandémie
Pour accompagner les entreprises
dans cette conjoncture difficile, les autorités ont mis en place un dispositif
financier musclé, pour venir en aide aux centaines de milliers d’entreprises en
situation de fermeture technique et durement frappées par cette pandémie. Mais,
cette politique très volontariste suscite des interrogations quant à ses
implications sur la résilience du système financier appelé à la rescousse des
entreprises.
Climat des Affaires : Le Covid-19,
redistributeur des cartes ?
La propagation rapide de la pandémie
du Covid-19 a pris au dépourvu l’ensemble de la planète en plongeant l’économie
mondiale dans l’incertitude. Tous les calculs savants se sont transformés, du
jour au lendemain, en simple spéculations. Les analystes admettent l’évidence
d’une dislocation du climat des affaires et d’une entrée de plain-pied, en
récession planétaire.
Les différentes économies frappées
d’anémie n’assurent plus que les fonctions vitales dans une totale extinction
de tout optimisme. L’opinion des patrons sur le climat des affaires est au plus
bas des niveaux historiques et la quasi-totalité des secteurs est en berne,
tant au niveau de la production que de l’investissement et de la distribution.
Le Maroc, qui au cours des dernières décennies, a enregistré des progrès
notables en matière de développement des infrastructures d’accueil et de
communication pour servir l’investissement espère trouver, dans les différentes
stratégies déployées, les ressources nécessaires pour faire face à cette crise.
Le rapport Maroc 2020 édité par le
cabinet d’intelligence économique Oxford Business Group table sur une résilience
du royaume soutenue par les grands chantiers réalisés ou en cours à l’exemple
du port Tanger Med et son extension (premier port d’Afrique) ou du déploiement
des énergies renouvelables ou encore des différentes mesures d’amélioration du
milieu des affaires.
Notation de l’Économie Marocaine :
Perspectives 2020 : Un sévère recul de l’activité
A travers le comportement de
quelques agrégats, le CMC propose une appréciation de l’économie nationale et
de certaines de ses composantes, selon une échelle décroissante à 3 valeurs, Ã
savoir A, B et C. L’objectif est d’aider les décideurs à une meilleure lecture
de l’évolution de l’économie nationale pour une meilleure prise de décision.
Cette évaluation repose principalement sur les données du tableau de bord,
régulièrement publié par le CMC et qui synthétise la situation économique,
financière, monétaire, budgétaire, sociale et de gouvernance.
Perspectives Économiques : 2020 :
Année des ruptures
Pas de répit, le fléau du
coronavirus s’acharne et continue ses ravages en pertes de vies humaines. Des
analystes enclins à un certain scepticisme croient même à une nouvelle vague de
la pandémie qui serait encore plus virulente. Au jour d’aujourd’hui, le nombre
total d’individus infectés, de par le monde, a atteint les six millions et
demi, le nombre des décès provoqués par cette maladie dépassent les 400 mille
et environ une population de 4 milliards de personnes à travers la planète se
trouve en confinement. Cette lugubre situation a mis à genoux l’économie mondiale
où des pans entiers des activités sont à l’arrêt et les secteurs les mieux
lotis tournent au ralenti. Et prétendre par des politiques de relance faire
rebondir l’économie à court terme pour qu’elle puisse emprunter le chemin
salutaire de la reprise relève du miracle.
Cadrage Macroéconomique : 2021 : Le
tournant
Aux dernières nouvelles, l’état
d’urgence sanitaire dont la levée tant attendue et qui était prévue pour le 10
juin sera prolongé d’un mois avec des assouplissements pour les territoires de
moindre risque. Un acte de prudence extrême et une déclaration de fidélité
absolue à la ligne politique poursuivie à ce jour visant à limiter la
propagation du virus, à sauver des vies et à protéger la santé de la population
et ce en dépit du prix économique à payer qui s’élève selon le Ministre des
finances et de la réforme de l’administration à 1 milliard de dirhams par jour
supplémentaire de confinement total.