Le Maroc est susceptible de tirer
avantage du climat particulièrement favorable qui caractérise actuellement le
commerce mondial, pour rehausser le niveau de ses exportations. C’est, du
moins, ce que vient de recommander le Centre marocain de conjoncture (CMC),
dans sa dernière publication mensuelle, « Maroc Conjoncture » n°337, publiée ce
lundi 19 juillet. Selon les auteurs de ce numéro spécial «Climat des affaires :
atouts et mesures d’amélioration», les perspectives du commerce mondial se sont
améliorées avec un commerce des marchandises qui a progressé plus rapidement
que prévu au second semestre de l’an dernier, dépassant son niveau d’avant la
pandémie. Et cette tendance ne semble pas se démentir, puisque le commerce
mondial de marchandises devrait augmenter de 8%, en volume, en 2021, après
s’être rétracté de 5,3% en 2020, selon les nouvelles estimations de
l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Le Maroc a, de ce fait, une vraie
carte à jouer, notamment dans la relocalisation industrielle, où il a pour
seuls sérieux concurrents, les pays d’Europe centrale et orientale (PECO).
Certes, de par leur proximité, mais aussi leur attractivité, ces PECO se
positionnent comme des destinations privilégiées pour cette nouvelle vague
d’investissements directs étrangers (IDE). Néanmoins, le Maroc ne manque pas
d’atouts pour contrer cette rude concurrence. Sa position géographique et ses
progrès enregistrés dans le classement international, relatif au climat des
affaires, renforcent considérablement son positionnement en tant que
destination de plus en plus attractive pour les investissements internationaux,
y compris ceux liés à la relocalisation industrielle.
Une conjoncture du commerce mondial
favorable
D’ailleurs, le président de la
Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Chakib Alj, s’était
exprimé sur la question lors de la 12e réunion annuelle du Comité national de
l’environnement des affaires (CNEA), présidée par le chef de gouvernement, Saad
Dine El Otmani. C’est ainsi qu’il a appelé, lors de cette rencontre marquée par
l’adoption de la politique nationale de l’environnement des affaires 2021-2025,
à une mise en œuvre rapide de la politique nationale de l’environnement des
affaires. Le patron des patrons avait déclaré, à cette occasion, que
«maintenant que nos priorités sont définies, accélérons la cadence de mise en
œuvre. Notre pays dispose d’innombrables acquis qui le rendent très attractif
en matière d’investissement. Ces acquis doivent être consolidés rapidement par
des réformes». Après avoir Insisté sur le le timing idéal que constitue cette
période post-Covid, El Alj a estimé que «les chaînes de valeur mondiales sont
actuellement en train d’être redéfinies, et le Maroc ne doit pas rater ce
tournant décisif pour se positionner».
En effet, même si la BERD a déjÃ
approché le royaume en y organisant, en partenariat avec la CGEM et la Bourse de
Casablanca, une série de neuf workshops destinés à repositionner le Maroc dans
les chaînes de valeur industrielles post-Covid 19 en Europe, la partie ne
saurait être véritablement gagnée qu’à l’issue de réformes favorisant la
compétitivité de l’entreprise marocaine, a-t-il souligné. Autrement dit, il y a
encore des efforts à faire en matière de réformes pour améliorer
l’environnement des affaires. Alj avait notamment pointé du doigt les
problématiques du foncier et de l’énergie, et défini, en tant que chantiers
prioritaires, les questions liées au financement, l’innovation et la
technologie.
Profiter de la redéfinition des
chaines de valeurs
Pour leur part, les experts du CMC appellent au recours massif aux nouvelles
technologies, et à la valorisation du capital humain et matériel, en vue
d’améliorer le climat des affaires. Parallèlement, ils ont salué la grande
réforme actuellement en vogue, visant à généraliser la protection sociale. Une
réforme qu’ils ont qualifiée de défi de taille d’aspiration à la cohésion
sociale, la préservation de la dignité des citoyens, la restructuration du
secteur informel et l’amélioration des conditions de vie des Marocains. Selon
eux, «par cette orientation, le royaume adhère à la recommandation de
l’Organisation internationale du travail (OIT), traitant de la protection
sociale, en adoptant l’agenda relatif aux Objectifs de développement durable
(ODD) qui ciblent, entre autres, l’élargissement de la couverture de la
protection sociale». Dans ce but, une série de «réformes dans la réforme» a
déjà vu le jour, dont les plus notables ont trait à la couverture médicale de
base, par l’introduction de l’assurance maladie obligatoire (AMO), la mise en
place du système d’assistance médicale (RAMED), l’extension de
l’assurance-maladie et du régime de retraite aux travailleurs indépendants non
salariés, ainsi que l’instauration d’instruments de transferts monétaires au
profit de certaines catégories de populations démunies. Bref, tout en saluant
ces avancées, les experts du CMC estiment que le plus dur sera d’assurer la
durabilité de ce projet. Dans la foulée, ils ont ensuite rappelé l’importance
de la statistique officielle dans la prise de décision économique. Selon eux,
«le rôle de l’information en général , et de l’information statistique en
particulier, est crucial pour le décideur économique. C’est devenu tellement
important que les données chiffrées, ainsi que les cadres et les outils qui les
maintiennent en cohérence, ont conquis une place prépondérante dans les
montages des stratégies des entreprises, et se sont imposées comme point nodal
incontournable des prises de décision en matière de politiques économique,
sociale et environnementale». Et ce ne sont pas Mohamed Benchaâboun, ministre
de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration et Abdellatif
Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib qui les contrediront. Intervenant lors d’un
séminaire organisé par l’Académie Hassan II des sciences et techniques, le
gouverneur de la Banque centrale avait notamment déclaré que le cadre du
système statistique national doit impérativement être révisé. Celui-ci est
encore régi par des textes qui remontent à 1968, soit plus d’un demi-siècle.
Ajoutant que, s’il faut prioriser un axe de réforme, celui-ci devrait concerner
l’amélioration de la production des données économiques quantitatives
infra-annuelles. De son côté, Mohamed Benchaâboun a estimé que cette refonte
devra s’appuyer sur la mise en place de systèmes d’information conformes aux
normes internationales, à même de répondre aux besoins récurrents et émergents
tant en quantité qu’en qualité, sur les plans national et régional. C’est ainsi
que le Maroc pourra être plus percutant, sur fond de concurrence accrue.
Pour le ministre, un intérêt
particulier devra être accordé à la Big Data, et ce travail devrait se faire
avec toutes les autorités compétentes. «Le renforcement de notre système
d’information est tributaire de la sensibilisation et de la mobilisation de
tous les partenaires, qu’ils soient publics ou privés», avait-il insisté. En
attendant le lancement de ce chantier, l’espoir n’est malheureusement toujours
pas encore permis pour le commerce de services, qui demeurera encore morose
tant que la pandémie n’est pas suffisamment maitrisée, au grand dam des
opérateurs du tourisme et du transport.