Politique budgétaire : Une baisse de croissance considérable

C'est l'année de toutes les incertitudes. Le Centre marocain de conjoncture (CMC) vient de revoir à la baisse les prévisions de croissance: -6,2% pour 2020, un niveau plus pessimiste que celui du Haut commissariat au plan qui table sur -5,8%!
Source : L’économiste
Posté Le : Vendredi 11 septembre 2020

Le taux serait de 2 points plus faible en comparaison avec les premiers pronostics qui s'appuyaient sur l'hypothèse d'une reprise plus rapide de l’économie mondiale et d’une loi de finances rectificative agressive.

Dans leur analyse, les économistes du CMC se sont basés sur trois événements. D'abord la flambée de la pandémie aux Amériques, en Inde et l’émergence d’importants clusters dans les autres régions. Ensuite, l’exacerbation de la récession de l’économie mondiale qui a pris de court bon nombre de prévisionnistes et surtout la déprime qui a enfoncé les économies des principaux partenaires du Maroc. Le taux de croissance mondiale estimé à -3% en avril est en retrait de 2 points soit à un niveau de -5%.

Enfin, la loi de finances rectificative dont  l’orientation budgétaire est jugée à contre-sens puisqu'elle vise la  stabilisation des équilibres des finances publiques alors que l’économie nationale traverse la pire récession de son histoire récente. «La politique budgétaire restrictive retenue dans la loi de finances rectificative n’effleurait même pas les esprits des adeptes du maintien des équilibres financiers», commentent  les économistes du CMC.

Or la majorité des états ont dérogé aux règles de prudence budgétaire en matière de déficit et d’endettement en vue de sauvegarder l'emploi et soutenir les entreprises en difficulté. Le CMC explique que «la politique budgétaire devrait être ponctuellement audacieuse pour réparer en partie les dégâts causés par la pandémie au tissu économique et apporter un fort appui à la demande finale qui souffre péniblement d’une atonie jamais enregistrée». Elle devait créer un contrechoc pour stopper «la  profonde dépression» provoquée par l’arrêt de nombreuses activités, les pertes de revenus et d’emplois.

Les mesures fiscales, les aménagements des paiements des crédits, soit les mesures d'aide mises en place sont indispensables au soutien des entreprises fragilisées. Elles restent néanmoins insuffisantes pour faire sortir l’économie de la situation où elle se trouve et redonner confiance aux opérateurs.  Une politique budgétaire agressive et un plus fort engagement de l'Etat à travers le lancement de chantiers d'envergure par le budget sont jugés plus opportuns.

Or,  en dehors des investissements programmés dans le cadre du Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du coronavirus  financé à plus «de 60% par les contributions bénévoles», les engagements initiaux prévus par la loi de finances 2020 ont été révisés à la baisse.

Le CMC reconnaît que la situation relative aux ressources est particulièrement désastreuse. Elles sont marquées par la baisse de près de 17,4% des recettes du budget général. Les comptes spéciaux ont eux enregistré une augmentation de l’ordre de 23% grâce au «Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du coronavirus» alors que les recettes d’emprunt (moyen et long terme) ont évolué de 40% soit une augmentation de 39 milliards de DH.

«En dépit de la pression exercée par la crise sur les marchés financiers, des marges de manœuvre pour l’économie nationale existent et restent à explorer sans mettre les équilibres financiers en danger», soulignent les économistes du CMC.

Dans ses prévisions, le CMC table sur un taux de croissance du PIB en termes réels de 5,5% pour 2021. Un taux qui serait le résultat du relèvement des activités permettant pour certaines de retrouver le palier du potentiel de croissance de 2019. Le scénario du CMC table sur une contribution dynamique et généralisée de tous les secteurs d’activités au profit de la croissance de l’année 2021. L'industrie devrait tirer profit du plan de relance. Elle  afficherait une croissance en volume de l’ordre de 3,6%. Le BTP bénéficierait du redémarrage des chantiers mis en veilleuse en 2020 et ceux qui seront éventuellement programmés dans la loi de finances 2021.

La valeur ajoutée agricole progresserait de 11,3% sous l’hypothèse d’une récolte céréalière de 70 millions de quintaux. Les mesures d’aide au profit des agriculteurs participeraient à ce résultat. Pour 2022, le taux de croissance serait de 4,1%.